Face aux nombreuses manifestations, notamment violentes ayant fait plusieurs victimes civiles et militaires au lendemain de l’élection présidentielle en Guinée, et avant la publication des résultats définitifs par la Cour constitutionnelle, des acteurs de la société civile appellent à la mise en place d’un cadre de dialogue inclusif afin d’aplanir les divergences et de permettre au pays de ne pas plonger davantage dans une situation très difficile.
Des organisations de la société civile, soucieuses de la bonne organisation et de la transparence du scrutin du 18 octobre dernier, avaient déployé des observateurs sur toute l’étendue du territoire national où 15.000 bureaux de vote avaient été érigés dans la perspective de cette élection présidentielle qui a mis en lice douze candidats.
Elles avaient, dans la foulée, mis en place des dispositifs de veille et d’alerte des conflits et des contentieux électoraux avant, pendant et après le scrutin, destinés à prévenir et à gérer, entre autres, les dangers qui pourraient affecter la paix civile dans le pays, en butte à des difficultés depuis plusieurs mois.
Même si tous les observateurs nationaux et internationaux ont fait chorus pour soutenir que le scrutin s’est déroulé dans le calme, force est de reconnaître que les lendemains de l’élection a plongé le pays dans une crise post-électorale par le fait que le leader de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), Cellou Dalein Diallo, par ailleurs principal challenger du Président sortant, Alpha Condé, s’est autoproclamé, contre toute attente, vainqueur au premier tour avant même la fin des opérations de centralisation et de décompte du vote.
Cette déclaration inattendue du candidat de l’UFDG, condamnée d’ailleurs par la société civile guinéenne a mis le feu aux poudres, provoquant la manifestation de joie de ses militants et ses sympathisants sur toute l’étendue du territoire national.
Des échauffourées ont éclaté à plusieurs endroits du pays, provoquant ainsi des pertes en vies humaines et des grosses destructions des biens publics et privés.
Déplorant les conséquences de ces manifestations, qui ont débouché sur des actes de violences, Abdoul Sacko, Coordinateur général du réseau Convergence des jeunes et leaders pour la paix et la démocratie (COJELPAID) a assuré que la crise que traverse la Guinée est multidimensionnelle et structurelle. Selon lui, la nécessite d’un débat de fond est devenue indispensable entre les acteurs concernés. Accusant la classe politique d’être à la base des clivages sociaux, il a déploré les violences qui continuent, fait-il observer, de caractériser la période post-électorale. «La politique se fait maintenant sur l’ethnie et non sur des débats d’idées où la capacité d’apporter un plus à l’édification nationale est quasi inexistante», a-t-il dénoncé.
Face à cette situation, a-t-il conseillé, le rôle de la société civile, tant dans la mise en place d’un cadre de dialogue que dans la promotion de la non-violence, s’avère nécessaire.
Ainsi, le coordinateur général du réseau COJELPAID préconise la mise en place d’un cadre de dialogue inclusif sous la conduite des leaders religieux dans le but d’aplanir les divergences.
Toutefois, il estime que pour assurer cette responsabilité de promotion de dialogue, les acteurs la société civile doivent d’abord se ‘’dédouaner’’ des injonctions politiques qui entachent parfois leur crédibilité. «Nous nous impliquons en tenant compte uniquement des problèmes, des soucis. Dans ce cas, la société civile peut être un rempart qui permet de rapprocher les positions de part et d’autre sous le leadership des leaders religieux », a-t-il ajouté.
Pour sa part, François Fadouwa Tolno, coordinateur national du Réseau ouest-africain pour l’édification de la paix (WANEP GUINEE), une élection d’une telle envergure devrait obligatoirement commencer par un dialogue entre les acteurs concernés. Une démarche qui, poursuit-il allait contribuer à aplanir les divergences et permettre d’éviter les clivages post-électoraux. «On est allé à cette élection où il y’avait déjà une crise de confiance entre les acteurs politiques », a-t-il rappelé.
Selon M. Tolno, le vent des contestations et des de manifestions continue de souffler dans le pays avant la proclamation officielle des résultats définitifs par la Cour constitutionnelle. «La crise est tellement profonde, et la crise de confiance grandissante, il est important de mettre les leaders religieux à contribution à travers un cadre de dialogue», a suggéré le coordinateur de WANEP- Guinée.
Ismaël Diallo