Le colonel Mamadi Doumbouya n’est pas du genre à se payer de mot. Il vient de le démontrer, en lançant une croisade sans merci contre les empires financiers, soupçonnés de collusion avec le pouvoir déchu. Cette opération « main propre », lancée sans tambour ni trompette, qui n’épargne pas non plus les responsables des régies financières et les gestionnaires de toutes les entités publiques, première du genre en Guinée, un pays pauvre, gangréné par la corruption, pourrait permettre de renflouer les caisses de l’État, obérées par des déprédations en do majeur.
Le président du Conseil national du rassemblement pour le développement (CNRD) n’est pas du genre à jouer petit bras. Le colonel Doumbouya ne fait pas non plus dans l’esbroufe ni les effets d’annonce. Comme tout bon légionnaire, il adore mettre la main dans le cambouis.
Et parmi les défis dantesques qu’il entend relever, à la faveur de cette transition, figure en bonne place la moralisation de l’administration publique.
Et c’est tête baissée, qu’il a décidé de foncer contre le « système » de cleptocratie, érigé en mode de gouvernance, depuis des lustres par une élite politico-militaire. Avec la complicité du monde des affaires, rompu dans l’art du blanchiment de capitaux volés.
A l’allure où va le train, on peut dire sans risque de se tromper que les jours de cette pieuvre, qui a survécu au CNDD et au régime permissif d’Alpha Condé, sont dorénavant comptés.
Il a fallu l’avènement d’un homme très dévoué à la Guinée, pour démythifier cette oligarchie corrompue.
Pour lancer les hostilités contre les fossoyeurs de notre économie, le colonel a procédé par un effet de surprise, en gelant tous les comptes des pontes du régime, au lendemain du putsch du 05 septembre.
Dans cette foulée, les secrétaires généraux des ministères, chargés d’exécuter les affaires courantes et les DAF, ainsi que les Directeurs généraux des régies financières, passeront sous les fourches caudines de la junte. Pour un état des lieux de nos finances.
Des cadres hors-sol sommés de rendre gorge. Mais pas qu’eux. Car l’épée de Damoclès judiciaire plane aussi au-dessus de certains magnats, dont les accointances avec l’ancien régime, faisaient d’eux des intouchables.
C’est le cas de Kabinet Sylla, ancien intendant de la présidence, devenue la cible d’une junte sourcilleuse. Les compagnies minières comme la Société Minière de Boké (SMB) ne sont pas non plus en reste dans cette opération « main propre ».
Pour éclairer l’opinion sur le combat qui est en train d’être mené contre les cols blancs, le Secrétaire général de la Présidence de la République, le colonel Amara Camara, l’un des maillons forts de la junte a profité d’une conférence tenue le samedi dernier, pour lever un coin du voile sur la Loi de finances rectificative 2021. Dont l’adoption avait provoqué une levée de boucliers au sein de l’opinion.
Le colonel Camara, qui a pointé du doigt de nombreuses irrégularités décelées dans cette LFR, a aussi juré que la junte confondra tous ceux qui se rendront coupables de concussion ou de déprédation. Surtout ces sorties massives d’argent, à la faveur du dégel des comptes, autorisé récemment par le CNRD.
Une brèche dans laquelle s’étaient engouffrés des gestionnaires à la petite semaine, à leur risque et péril.
Mamadou Dian Baldé